En réponse à la proposition d’écriture d’Arlette Mondon-Neycensas, vous nous avez envoyé votre lettre d’admiration à l’artiste avec lequel vous êtes depuis longtemps en dialogue intérieur. Voici le texte de Véronique Cauquil.
Yasmina,
Comme je n’y arrive pas en amour je me demande où ça va nous mener où tout ça ? J’ai lu ton premier livre « Nulle part » tu as dit c’est par là qu’il faut commencer, commencer par nulle part j’ai trouvé ça drôle, bon c’est vrai que tu l’es, drôle et aussi subversive, déroutante, tu écris et tu ouvres la piste, ton jugement est sûr, tu mets les mots plein phare là où ça brouille.
Par exemple moi j’aime que tu nous rappelles que ce sont nos nerfs qui nous gouvernent, ça c’est totalement à l’envers de la soupe qu’on nous sert « il suffit de bien respirer » tu parles ! Quand la soupière est pleine, ça t’ébouillante le cœur, tu suffoques de larmes et de rage, tu fais la respiration du petit chien et tu n’as pas du tout envie d’étreindre un arbre mais plutôt d’étrangler celui qui t’a mis ce chagrin dans la gorge, tout ça tu nous le montres comment on déraille dans « Carnage » jusqu’à vomir un succulent crumble pommes-poires fait maison sur un Kokoschka, édition très rare et pourquoi quand le vernis craque on est pareil que le petit garçon qui arrache un bout de lèvres à l’autre et dans « Heureux les heureux » l’amour ça égratigne, même au supermarché, pas la peine d’avoir honte de ne pas être lisse, la paroi est fine, des fois un mot et ça dérape.
Et puis, « Nulle part » c’est tellement tendre, à fondre, je me suis dit alors c’est comme ça avoir des enfants, le cœur empoigné tout le temps.
J’ai dit « tu » pardon c’est l’émotion.