Le Salon du Livre et de la Presse Jeunesse réunissait tous les professionnels de la littérature pour enfants et adolescents à l’Espace Paris-Est de Montreuil du 2 au 7 Décembre 2015. Il comptait près de 150 stands et 4 scènes de conférence sur 2 niveaux. Des centaines d’auteurs, illustrateurs, éditeurs et libraires prêts à accueillir les 140 000 visiteurs attendus!
Pour ce dossier spécial Salon du Livre Jeunesse, nous avons rencontré 6 auteurs et 2 éditeurs jeunesse, que nous vous ferons découvrir pendant trois semaines. Tout d’abord place à l’écriture collective, pour la genèse de U4, grand succès de librairie.
U4, récits croisés
Par Marie-Hélène Mas
Les auteurs de U4 reviennent sur la genèse de cette œuvre collective parue en août dernier, un récit croisé dont les romans se déroulent sur une même période et peuvent se lire indépendamment. Comment est né ce projet ? Quelles ont été leurs motivations et leurs façons de travailler ? Avec les auteurs Florence Hinckel, Carole Trébor, Yves Grevet, Vincent Villeminot et les éditrices Eva Grynszpan (Nathan Jeunesse) et Sandrine Mini (Syros).
Synopsis
Un virus foudroyant a décimé 90% de l’humanité et c’est dans ce monde post-apocalyptique que doivent survivre quelques adolescents isolés. Yannis à Marseille, Stéphane à Lyon, Koridwen en Bretagne et Jules à Paris ne connaissent rien de l’existence des autres mais leurs routes vont se croiser et leurs destins se lier malgré eux.
U4 : 4 auteurs pour 4 héros, 4 romans pour 4 aventures au service d’une seule et même intrigue. Mais son autre particularité, c’est que U4 n’est pas une quadrilogie insécable ! Non, les 4 histoires peuvent être lues indépendamment les unes des autres, sans ordre chronologique et sans impératif.
C’est d’une rencontre fortuite entre ces 4 auteurs dans un salon littéraire régional en Mai 2013, que naît cette envie d’un travail collectif. Partant de là, ils définissent le contexte, la trame, les principaux rouages, se mettent d’accord sur les différents personnages et rencontrent leurs éditeurs respectifs.
Nathan et Siros acceptent de signer ce pari un peu fou et soutiennent les 4 instigateurs dans leur projet.
Chaque auteur se retrouve alors seul face à la page blanche pour écrire un premier tiers de son roman. Dans ces quelques chapitres, les héros sont isolés du reste du monde, à l’image de leur créateur.
Les écrivains se rejoignent quelques temps après, dans le sud de la France, pour plusieurs semaines de travail collectif : présentation du caractère de chaque personnage, coordination des scènes de rencontres dans chaque roman, évolution des rôles secondaires,… s’en suivent des heures de discussions, débats, compromis et petits arrangements entre auteurs, afin que chacun s’y retrouve.
Non seulement ils doivent se mettre d’accord sur les moindres détails de l’intrigue mais ils doivent aussi veiller à ne pas spoiler les autres en donnant des informations transverses et traquer les éventuelles incohérences d’une même scène dans 2 récits.
Chacun repart alors de son côté pour poursuivre son écriture, non sans échanger par mail ou Skype.
En septembre 2014, ils sont contraints de réécrire les fins qu’ils avaient d’abord envisagées pour respecter l’évolution des personnages et de leur histoire. Quand ils sont prêts à mettre le point final à leurs ouvrages respectifs et à leur aventure collaborative, les éditeurs prennent le relais, et c’est fin août 2015, qu’ils se réunissent à nouveau pour la sortie officielle de U4.
Difficultés et jubilations
La première difficulté que les auteurs ont rencontrée a été de confronter leur personnage aux regards des autres. Lorsqu’on travaille seul, on prend le temps de construire son héros sans intervention extérieure jusqu’à ce que l’histoire puisse être lue. Dans le cas de U4, chaque créateur a dû l’exposer et entendre ce qu’en pensaient les 3 autres.
Il faut alors choisir entre accepter ou refuser les critiques, défendre, convaincre et s’adapter.
De même, pour respecter la logique du récit, certaines scènes doivent être imposées à tel ou telle auteur.
Ils se sont également rendu compte qu’ils avaient 4 façons différentes d’écrire et pas les mêmes rythmes. Il faut alors expliquer aux autres comment on travaille, quelles étapes on suit, quel cheminement est nécessaire et pourquoi ? Ils reconnaissent d’ailleurs volontiers que ces échanges, bien que parfois tendus, ont enrichi leur vision de l’écriture.
Par exemple, Vincent Villeminot, qui a l’habitude d’écrire à la 3ème personne, a dû se plier au choix de la majorité qui prônait des récits à la 1ère personne pour chaque héros de U4. Une nouvelle approche, finalement jouissive, bien qu’il ne soit pas toujours facile de bousculer ses habitudes et perdre son confort.
U4, c’est une écriture à 8 mains épique au service de 4 héros uniques pour un récit science-fantastique !
M-H. M.