Le point final du manuscrit posé, une nouvelle étape s’impose à l’auteur : trouver un éditeur pour son texte. Comment les sélectionner et les contacter ? L’Inventoire a posé ces questions à François Terrier, journaliste et éditeur, qui va animer une formation autour de ce thème « Présenter son manuscrit aux éditeurs » du 26 au 28 janvier 2024 à Paris.
L’Inventoire: Comment sait-on qu’un texte est terminé, qu’il faut cesser de le retoucher et envisager sa publication ?
François Terrier : J’évoque cela en début d’atelier. Il arrive un moment où on doit s’arrêter car un manuscrit peut se poursuivre indéfiniment. L’auteur n’est jamais vraiment satisfait, il souhaite toujours changer un mot. Je conseille de s’imposer un planning, avec une échéance.
L’Inventoire: Pour un premier roman, à quel type de maisons d’édition est-il préférable de s’adresser ?
François Terrier : Pour un premier roman, si l’auteur n’est pas connu et n’a pas de réseau, il va être difficile d’être publié dans de grandes maisons d’édition.
Un manuscrit envoyé dans une petite maison d’édition (qui reçoit 20 à 30 manuscrits) a plus de chance d’être publié que chez Grasset, Actes-Sud, Flammarion ou Gallimard qui en reçoivent des milliers.
Un petit éditeur a besoin de publier régulièrement pour exister. Si cet éditeur publie seulement 2 à 3 titres par mois, il va se donner les moyens de valoriser le livre, d’en assurer la promotion.
Dans une grande maison d’édition, si vous êtes un des 50 livres qui paraissent dans le mois, l’éditeur risque de moins s’occuper de votre titre. Je schématise bien sûr, il existe toujours des contre-exemples.
Trouver un éditeur pour un premier manuscrit est souvent difficile, abordez-vous l’autoédition dans votre atelier ?
Au début de l’atelier, nous travaillons beaucoup sur l’édition traditionnelle qui est au départ l’objectif commun à tous. Puis nous définissons l’objectif de chacun, à savoir, pourquoi souhaite-t-il publier son manuscrit ?
Les motivations pour être édité chez un éditeur traditionnel sont multiples : la volonté de laisser une trace, le plaisir d’avoir publié un livre, gagner de l’argent, etc.
Je leur présente ensuite, une autre possibilité. Un auteur n’ayant pas trouvé un éditeur traditionnel peut envisager l’autoédition. C’est également un moyen d‘exister.
Les éditeurs lisent-t-ils tous les manuscrits qu’ils reçoivent ?
Si le manuscrit arrive par la poste ou par mail, l’éditeur commence par lire la lettre d’accompagnement. Il essaye de comprendre qui est l’auteur et quelle peut être l’originalité de son manuscrit. Ensuite, il jette un œil sur le texte et se forge très rapidement une opinion. Bien souvent, un survol des 30 premières pages lui suffit.
Normalement l’éditeur parcourt chaque manuscrit. Il ne veut surtout pas passer à côté de la perle rare. Certaines maisons d’édition, comme Gallimard, reçoivent plus de 5 000 manuscrits par an et doivent aller très vite dans leur lecture.
Vous évoquez la lettre d’accompagnement au manuscrit. Dans votre atelier, travaillez-vous également sur cette lettre?
Oui, c’est essentiel car il s’agit du premier contact avec l’éditeur, un peu comme une lettre de motivation, l’auteur doit séduire.
Durant l’atelier nous réalisons un travail individuel sur cette lettre d’accompagnement.
Je propose donc aux participants de travailler sur leur originalité, sur l’angle particulier de leur livre, etc.
Il est donc très important de savoir bien présenter son manuscrit ?
Par expérience, je sais que la présentation du manuscrit est déterminante, notamment son aspect visuel. Un manuscrit bien présenté donne plus envie de lire, d’être plus attentif que lorsque l’éditeur doit décrypter ou lire des caractères trop petits.
Par exemple, un manuscrit avec une certaine marge, un interlignage assez important permet de prendre des annotations, d’avoir des repères et donc de mieux entrer dans le texte (source 2020).
L’autoédition peut donc être une solution pour publier un premier livre ?
Oui, comme je vous l’expliquais, il s’agit d’un moyen d’exister. Cela peut également être un moyen de se faire remarquer par un éditeur si le livre auto-édité rencontre le succès.
Aujourd’hui, il existe plusieurs types d’autoédition, papier ou numérique, ou même les deux. L’auteur peut opter pour l’imprimeur traditionnel bien sûr mais également pour une plateforme en ligne. Dans l’atelier, je leur présente toutes les pistes.
Concernant le numérique, les plateformes vous expliquent que vous serez référencés sur leur site. Cependant, elles ne vous expliquent pas comment le lecteur potentiel fera pour trouver votre bouquin parmi les 4 000 présents sur site.
Ces dernières années, les plateformes en ligne se sont développées. Pensez-vous qu’elles vont s’installer durablement dans le paysage éditorial français?
L’autoédition est un choix, elle implique que l’auteur sache faire la promotion qui dans l’édition traditionnelle relève du travail de l’éditeur.
D’après les chiffres du SNE, pour la fiction, un manuscrit sur cent est publié par une maison d’édition. Vous imaginez la frustration des 99 autres ?
L’autoédition est donc un moyen de satisfaire ces attentes. Donc, oui je suis persuadé que ces plateformes vont se développer.
Pourquoi suivre l’atelier Présenter son manuscrit aux éditeurs?
La première partie de cet atelier permet de découvrir l’envers du décor.
Un livre coûte cher, un potentiel de vente doit être identifié par l’éditeur pour qu’il ait envie de publier un titre. J’explique donc aux participants comment se répartit l’argent par rapport au prix public d’un livre ; comment fonctionne une maison d’édition, la diffusion et la distribution d’un livre.
Connaître les coulisses permet de se donner les meilleures chances de séduire un éditeur, de savoir adapter sa lettre d’accompagnement et la présentation de son manuscrit. J’explique donc comment présenter la lettre et le manuscrit de manière professionnelle et attractive pour l’éditeur.
Durant la troisième partie, j’aborde l’autoédition qui, comme je vous l’ai expliqué peut être une alternative, selon les projets, à l’édition traditionnelle.
Avez-vous une anecdote sur l’atelier ou les manuscrits à raconter ?
L’an passé treize personnes ont suivi l’atelier. Je suis resté en contact avec certaines et deux m’ont annoncées qu’elles allaient être éditées dans l’année. L’une chez un éditeur traditionnel et l’autre a choisi la voie de l’autoédition.
Nous avons évoqué la difficulté à se faire éditer, alors qu’au moins deux participants sur treize y parviennent est une sacrée satisfaction !
Pour en savoir plus sur l’atelier que François Terrier animera Présenter son manuscrit aux éditeurs.
Propos recueillis par Nathalie Hegron