Depuis deux ans, fleurissent de nouvelles revues de textes courts. Curieuses de formes actuelles, mêlant les genres artistiques, féministes ou engagées, férues d’humour ou créatrices de poésie à disséminer, le retour des revues est bien là. Le temps presse, parfois modestes dans leur fabrication, elles ne le sont ni dans leur ambition ni leur contenu. Il faut publier vite, on ne sait pas de quoi sera fait demain.
Comme une nouvelle avant-garde, rappelant l’entre-deux-guerres, ces revues sont le signe d’une redistribution de la parole dans un monde atomisé par les catastrophes en cours. Elles sont un remède à l’écroulement des valeurs, et plutôt que de regarder en arrière, elles ont choisi de vivre le présent en faisant entendre des voix singulières. Nous leur consacrerons trois articles jusqu’au printemps. Aujourd’hui : Pourtant, Marginales et L’éponge. La semaine prochaine, des revues qui publient poésie ou essai : Une chambre à soi, Facteur Galop, L’Ours Blanc.
Aleph-Ecriture recevra aux Ateliers (9 rue Saint Petersbourg dans le 8ème à Paris), la revue Pourtant le 22 novembre 2023 à 18h30. Seront présents : son fondateur, l’équipe rapprochée et 3 auteurs publiés dans les derniers numéros de la revue. Ils nous parleront des appels à textes notamment, du processus de sélection et de leur ligne éditoriale. La soirée se poursuivra par des lectures.
Pourtant
Créée en 2020, Pourtant est une revue de rencontre littéraire et photographique paraissant deux fois par an. Chaque numéro conçu autour d’un thème fait l’objet d’un appel à contributions permettant de découvrir de nouveaux auteurs, et invite des auteurs déjà connus. S’y croisent, nouvelles, poésie et séries photographiques (Lire ici l’interview de Gilles Bertin, fondateur de la revue).
Le N° 6 de la revue, sorti en octobre, a pour thème « Sauvage ? » Il a fait l’objet de lectures lors du dernier salon de la revue.
Qu’est-ce qu’être sauvage ? Pour le photographe Alain Mangeot, en couverture, c’est le mouvement. Pour d’autres, le divorce inéluctable de l’homme et du sauvage (lire la bouleversante nouvelle de Pascal Dessaint « le dernier fil », où un homme pleure devant sa télévision devant le dernier documentaire animalier). Ce numéro est à découvrir dès à présent, notamment aux Cahiers de Colette ou à la librairie Le Monte en l’air, et au Rideau rouge.
Le N°5 de la revue est sorti en janvier 2023 sur le thème « Je mens ». Divisée en 7 sections, la mise en dialogue des oeuvres des 22 contributeurs est sobre, tout en fluidité élégante (séries de photos, poésies, nouvelles, et photo-textes). La force des blancs, notamment autour des photographies, est notable. Ainsi, dans la section Je pars au flou, deux très belles séries noir et blanc de Frédéric Martin A rebours et Sans trève, et des nouvelles étonnantes comme Une échappatoire d’Adèle Debouverie et un poème de Karine Baudot Les yeux de Louise.
L’appel à textes du N° 7 est lancé sur le thème « Fenêtres », jusqu’au 30 novembre en ce qui concerne la photographie. Il est accompagné de sources d’inspiration qui définissent les pistes d’un avant-sommaire. .
Marginales, la fiction pour dire le monde
Créée en 1945, la revue belge de nouvelles, Marginales, a été reprise en 1998 par Jacques De Decker, grande plume culture de la rédaction du quotidien Le Soir (Belgique). Dans la continuité de cette ligne, c’est actuellement Vincent Engel, son nouveau directeur, qui poursuit la mission de la revue « chercher les vérités cachées de l’actualité à travers le prisme de la fiction » en ouvrant désormais la revue à des auteurs et des photographes issus de toute la Francophonie. Le site en ligne propose également la « nouvelle du jour » qui renvoie à un article du journal Le Soir. La revue est en prise avec l’actualité politique et sociale et paraît trois fois par an, sur un thème ouvert à appel à textes. Pour « La nouvelle du jour », l’appel à textes est permanent ici, et pour ceux concernant les trois numéros annuels, il faut se rendre sur le site Marginales
Le N°308 « La loi phallique est dure » vient de paraître, et est consultable en ligne.
Un numéro papier reprenant les contributions du site les plus représentatives de l’année écoulée est publié une fois par an. La fiction éclaire toujours l’actualité.
L’éponge
L’Éponge est une nouvelle revue axée sur la littérature, la philosophie, le graphisme, la photographie et la bonne humeur. Une sorte de laboratoire d’expérimentations fondé par Aurélie Gauthier et Jean-Michel Léglise.
Nous ne l’avons pas encore reçue, mais son format nous intrigue, dans son souhait de renouer avec l’aspect visuel des grands quotidiens d’après-guerre (il y accueille d’ailleurs des dessins de presse), c’est cette fluidité annoncée entre l’actualité et la fiction qui est intéressante.
Le premier numéro devrait être tiré à 300 exemplaires en noir et blanc et sera présenté le 17 février à Paris. L’éponge cherche des textes pour son N°2, jusqu’au 15 mai 2023.
Il n’y a pas de thème imposé mais « un lien avec la société dans laquelle nous vivons. Un artiste s’imprègne de ce qui l’environne et produit une œuvre dans laquelle il y met du lui-même » cliquez ici pour tout savoir.
La suite la semaine prochaine !
Danièle Pétrès
Rédactrice en chef
Les nouvelles revues de poésie et de textes courts (2/3) : penser le monde