« Les soirs de novembre sont calmes, silencieux, secs », dans la maison du titre, laquelle est un des personnages principaux de ce roman, dont Belfond vient de republier la (remarquable) traduction parue une première fois chez Stock en 1965, année où il reçut le prix Pulitzer.
Les longues après-midi d’été seront particulièrement propices à la lecture d’un tel récit, issu de la grande tradition littéraire née dans le sud des États-Unis. Une histoire de famille et de vengeance, qui se signale par sa construction subtile et majestueuse, par la présence intense de ses multiples personnages et, surtout, par le rôle qu’y tient le cadre naturel, magnifiquement évoqué. Les curieux rapports, mélange de contrastes et de complémentarité, qui l’unissent et l’opposent aux hommes font du livre de Shirley Ann Grau un grand roman de la présence au monde.
La voix d’Abigaïl, la narratrice, nous tient et nous emporte d’un bout à l’autre. Elle raconte l’histoire de sa famille depuis les premiers colons jusqu’à la guerre de Corée, et dessine peu à peu une intrigue prenant sa source dans les relations complexes entre Noirs et Blancs, au sein d’une société encore marquée par l’esclavage et la guerre de Sécession.
Une montée très progressive de la tension mène à la crise, à la violence, à la mise au ban de l’héroïne par la bonne société blanche du comté… puis, en un finale éblouissant, à sa revanche.
P.A.
Shirley Ann Grau, Les Gardiens de la maison, traduit de l’anglais par Colette-Marie Huet, Belfond [vintage]
Pierre Ahnne est écrivain et a créé un blog littéraire sur lequel il partage chaque semaine ses lectures. Il réalise également des retours sur les manuscrits qui lui sont confiés par Aleph-Écriture dans le cadre des lectures-diagnostics. Il partage régulièrement certains de ses articles sur L’Inventoire.
Dernier ouvrage paru : « Faust à la plage » (Editions Vendémiaire, 2022).