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Photo Hervé Couton

Cette semaine, Hervé Couton, photographe et grand lecteur, nous fait partager  son coup de coeur littéraire: « Les douze tribus d’Hattie » d’Ayana Mathis (Editions Gallmeister, 2014)

« Maman, je ne retournerai plus jamais la bas, plus jamais ! » Ainsi parle Hattie, arrivée à Philadelphie avec sa mère et ses sœurs après avoir fui leur Géorgie natale et son racisme quotidien, en découvrant qu’à Philadelphie les Noirs ne descendaient pas dans le caniveau pour laisser passer les blancs, pas plus qu’ils ne regardaient obstinément le bout de leurs chaussures ».

Hattie  Shepherd n’a que 17 ans quand elle met au monde ses jumeaux. August, qui n’en est pas le père, va accepter de les élever en épousant Hattie. Mais la mort de ces enfants atteints de pneumonie à 7 mois va marquer Hattie au plus profond d’elle même, tout comme le comportement d’August qui se révèlera très vite volage et irresponsable bien qu’attentionné et aimant à sa façon les 9 autres enfants qu’Hattie lui donnera.

Chaque chapitre du livre, construit comme une nouvelle, correspond au déroulé de la vie de  chacun des enfants d’Hattie ainsi que de sa petite fille. A travers ces portraits que l’on parcourt de 1929 a 1980, on reconstruit ce qu’a été la vie de leur fière et ambitieuse mère, mais on découvre également l’histoire du peuple Afro Américains à travers le jazz, la religion, la guerre du Vietnam et son émancipation plus ou moins réussie. Dépeinte comme une femme forte mais faillible, menant un combat quotidien contre la misère qu’elle refuse pour les siens, Hattie se sera montrée « irascible a l’égard de ses enfants et d’August, qui ne lui aura apporté que déception ».

Plus que l’amour qu’elle aura donné sans démonstration,  c’est peut être la liberté qu’elle aura essayé de leur insuffler, avec plus ou moins de succès, en vue de les « préparer à affronter le monde » car « Le monde n’aurait pas d’amour à leur offrirl ».
Ce premier roman de l’afro-américaine Ayana Mathis, publié dans l’extraordinaire collection américaine Gallmeister est un véritable bijou conduit par un seul sentiment : l’amour. Si l’auteure se réclame de Toni Morrisson, ce ne sont pas les démons de la ségrégation et du racisme qui la poursuivent, mais plutôt ceux de l’intégration américaine du peuple noir et de sa difficulté à se réaliser.

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« Les douze tribus d’Hattie » d’Ayana Mathis. Editions Gallmeister (2014)

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