En réponse à notre appel à écriture, « La maison farfelue », voici un texte Nathalie Gorce et un dessin de Valérie M.
Je suis rentrée dans l’ascenseur. J’ai hésité à décoller l’affiche tellement je la trouvais belle mais je me suis raisonnée et j’ai juste déchiré le premier coupon, funambule…
« Bonjour Jérémie, je suis Rosa la funambule », il avait une belle voix grave, et tout paraissait simple avec lui, il suffisait d’être là. Je le questionnais sur l’option pleine lune mais il me dit juste qu’on en reparlerait.
Le jeudi, j’ai pris l’ascenseur, j’ai appuyé sur le dernier bouton et je remarquais juste au dessus l’écriteau « Ciel, créateur d’élévation » en le prenant comme un signe. Quand la porte s’est ouverte, j’ai eu un mouvement de recul, elle s’ouvrait et j’étais déjà sur le toit, on voyait loin. On était huit debout sur le zinc, avec ce point commun d’avoir tous les yeux grands ouverts. Jérémie a commencé à parler, un mélange flou du Petit Prince et de Peter Pan. Il nous a raconté l’histoire des nuits de la pleine lune quand les ombres se dessinent et vivent sur les murs.
Quand ça a été mon tour, il m’a donné trois fleurs : une en forme de masque que j’ai glissé sur mon visage et deux fleurs blanches pour chaque main,« pour l’équilibre » il m’a dit. J’ai commencé à marcher légère, je crois bien que je suis devenue moi même une grande fleur longiligne debout dans l’air du soir. Mes voisins répétaient leurs figures entre cheminées, fenêtres et arêtes du toit. C’était magique. Mais le 5 juin le fût plus encore, une vraie fête des sens et de l’imaginaire. On pouvait tout inventer et même les mots.
C’est le 17 que j’ai dit à Jérémie : « Je crois que je suis circassienne de toi. »