En réponse à notre appel à écriture, « La maison farfelue », voici un texte et un dessin de Fanny Soulard
L’annonce était claire : « Vous êtes jeune, en bonne santé, vous aimez prendre des risques, et êtes attiré par l’extraordinaire. Nous constituons une équipe de choc pour une mission courte mais à haut risque. Si intéressé(e), merci de vous présenter le lundi 11 mai à 9h00 précises devant la Résidence Eden, 2 rue du Paradis».
Jeune, je l’étais, intrépide et sans peur. J’avais résisté aux attaques successives du méchant virus – « une sacré vacherie » qu’ils disaient – et j’en étais très fier. Je me présentai ganté et masqué le jour J sur le lieu donné pour cette mission spéciale. A l’entrée de la résidence, une pancarte écrite à la main : « Vous entrez dans une zone à haut risque, portez un masque et des gants spécifiques à votre mission. Sur un plateau devant moi : des gants MAPPA, et un masque de plongée avec tuba. « Prenez l’ascenseur sur votre droite, montez au 11ème étage ». Je m’exécutai. Là-haut, m’attendaient une panoplie de cosmonaute, un balai O’Cedar, un seau et une serpillère accompagnés d’une note d’instructions : « chambres 110-112-114-116-118 à décontaminer de toute urgence sans rien déplacer SVP ». Je me postai devant la 110. Sur la porte un prénom : Jeanne 1924-2022, suivi d’une croix. J’ai fermé les yeux, respiré un grand coup et j’ai plongé au cœur de l’(ultra)ordinaire.