En réponse à notre appel à écriture, « L’affût un style de vie », voici un texte et une photo d’Ema Dée
Je tiens ma méthode d’un voisin, indirectement : l’affût par intermittence. Le matin et le soir, toujours aux mêmes heures, il se met à son balcon, fume sa cigarette – regarde alentour – puis il rentre, satisfait. Bon, je ne fume pas et je n’ai pas de balcon, et il m’en faut plus pour être satisfaite. Mais comme lui, j’aime les horaires fixes et regarder. Et à horaires fixes, j’observe depuis deux points de vue distincts. 1° la fenêtre de ma cuisine. Planquée derrière mes rideaux, je jette un œil insistant sur le boulevard. 2° la fenêtre de ma chambre qui donne sur un carré de verdure, dit « le jardin », cerné par des immeubles bas. Je lève tout à fait mes stores, j’ouvre en grand, je m’installe carrément les coudes sur la balustrade de la fenêtre, et comme certains de mes voisins, je dresse des inventaires. Bilan : un convoi d’automobiles folles, une voisine voyeuse, un jogguer septuagénaire, deux dames et leurs caddies jumeaux, une rixe et quatre poules en quête d’un trésor enfoui.