En réponse à notre appel à écriture, « L’affût un style de vie », voici un texte de Béatrice Putégnat
Fourneaux
La clameur du silence m’a réveillée. Tous les silences ne sont pas les mêmes. Les sons ne jaillissent plus dans une clameur symphonique. Chacun est un solo honteux. Sans écho.
Le chat dort sur le canapé. Tout est normal. La double fenêtre s’ouvre sur un magma cotonneux, blanchâtre avec des fibres d’un jaune sali, grisé. Je scrute l’épaisseur du brouillard. Tenter d’apercevoir un peu de couleur. Celle des briques du Nord qui se fondent dans un camaïeu qui traverse le temps. Celle des ardoises grises et des fenêtres en double vitrages cernées de PVC blanc.
Le brouillard a ingurgité la ville. Ses formes, ses couleurs, ses sons.
Je ne vois rien. Un voile épais a tout recouvert. J’ouvre la fenêtre. Je tends la main pour tenter de trouer le vide opaque. Toucher puisque je ne peux pas voir. Des gouttelettes se déposent sur mes doigts. Je referme la fenêtre. Un dernier coup d’œil. L’atelier de la boulangerie s’allume. Dans quelques minutes, les fourneaux s’allumeront. Il est 4h du matin.