Par Nathalie Hegron: Les livres qui ont marqué Barack Obama
Que lit un Président ? That is the question à laquelle, tout au long de ses deux mandats, Barack Obama n’a cessé de répondre, expliquant l’importance de la lecture dans sa vie mais également celle de l’écriture : « La puissance des mots m’a permis de comprendre qui j’étais. » (in New-York Times, janvier 2017).
Enfant, il a trouvé une source de réconfort dans la lecture : « J’adorais lire, en partie parce que je voyageais très souvent […] Avoir ces univers mobiles, qui m’appartenaient et dans lesquels je pouvais pénétrer, c’était très attrayant pour moi. »
En 2006, Barack Obama a publié L’audace d’espérer, puis en 2009 Les rêves de mon père. À la Maison Blanche, il a raconté manquer de temps à consacrer à la littérature mais publiait quand même sa liste de lecture de vacances. L’été 2010, il a ainsi activement participé au succès de Freedom de Jonathan Franzen, présent dans sa liste.
Le 18 janvier 2017, Michiko Kakutani, célèbre critique littéraire au New York Times a interrogé Barack Obama sur les lectures qui l’ont marqué. Voici cette liste de 10 livres commentée par Barack Obama.
1- Le Problème à trois corps de Liu Cixin
Obama qualifie cette oeuvre «d’étonnamment imaginative et vraiment intéressante » et pense que « la portée de ce texte est immense ».
Il s’agit d’une trilogie de science-fiction très populaire en Chine qui raconte l’invasion de la Terre par des extraterrestres, les Trisolariens, et comment les gouvernements et les scientifiques vont réagir face à la menace.
2- Junot Díaz et Jhumpa Lahiri
Ces écrivains américains, Junot Díaz est d’origine dominicaine et Jhumpa Lahiri d’origine indienne, abordent l’immigration dans leur œuvre. Obama les cite car ils «parlent effectivement d’un pan très particulier de l’immigration contemporaine. Mais à côté de ça, ils évoquent aussi cette combinaison — qui est, je pense, universelle— de l’envie de vouloir aller vers un monde meilleur, associée au sentiment de déracinement et de nostalgie. Leurs romans sont donc directement connectés à une grande partie de la littérature américaine. »
3- Gone Girl de Gillian Flynn
Obama apprécie également certains thrillers bien écrits : «Gone Girl est un livre de bonne qualité littéraire et très bien construit.»
4- Fates and Furies de Lauren Groff
Obama qualifie ce roman de «vraiment puissant».
A tel point qu’il avait désigné roman de l’année 2015 l’histoire de ce couple en apparence parfait mais qui tourne au fiasco.
5- Le second discours d’investiture d’Abraham Lincoln
« Je placerais le Second discours d’investiture devant n’importe quel texte américain — aussi bon que n’importe quel autre. L’un des plus grands plaisirs de la présidence se trouve dans la Chambre Lincoln, il y a là-bas une copie manuscrite du discours de Gettysburg, l’un des cinq exemplaires rédigés pour un organisme de bienfaisance.
Et il m’est arrivé, le soir, d’aller dans cette pièce, située juste à côté de mon bureau privé, juste pour le lire. »
6- Le chant de Salomon de Toni Morrison
Barack Obama, très proche de Toni Morrison, lui a remis la médaille de la Liberté en mai 2012. « Le chant de Salomon, me vient à l’esprit quand je pense aux personnes qui traversent certaines épreuves. Il ne s’agit pas juste de décrire la souffrance, mais il y a aussi de la joie, de la gloire et du mystère. »
7- A la courbe du fleuve de V. S. Naipaul
«Le livre débute ainsi : Le monde est ce qu’il est ; les hommes qui ne sont rien, qui se permettent à eux-mêmes de ne rien devenir, n’y ont pas leur place. Et je pense toujours à cette phrase, à ses romans quand je constate la dureté du monde quelques fois, en particulier en matière de politique étrangère. Je résiste et lutte parfois contre cette façon de penser cynique, mais plus réaliste. »
8- Gilead de Marilynne Robinson
«J’ai commencé à lire Marilynne Robinson dans l’Iowa, où Gilead et quelques-uns de ses meilleurs romans se passent. J’ai aimé son écriture en partie parce que je côtoyais ces gens tous les jours. »
9- William Shakespeare
« A la fac, j’ai suivi un cours fantastique sur Shakespeare qui m’a donné envie de lire ses tragédies et de les étudier plus en profondeur. Et cela a été essentiel pour moi, dans le sens ou cela m’a permis de comprendre comment les schémas se répètent et se répercutent sur les êtres humains. »
10- The Underground Railroad de Colson Whitehead (NDLR : non traduit en français à ce jour).
« Le dernier roman que j’ai lu, The Underground Railroad relate la façon dont la douleur de l’esclavage s’est transmise de génération en génération, sans parler forcément de l’aspect visible, mais plutôt de ce qui a changé dans les esprits et les coeurs. »
Lors de son discours d’adieu du 10 janvier 2017, Barack Obama a eu recours à la littérature pour expliquer l’empathie. Il a repris un extrait du fameux roman d’Harper Lee, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur : « Vous ne comprenez vraiment une personne que lorsque vous considérez les choses de son point de vue et que vous vous mettez dans sa peau. »
Les élections présidentielles approchent en France, il serait intéressant d’interroger nos candidats à ce sujet et qu’ils y répondent sincèrement. Les livres plébiscités par un homme politique en disent souvent long sur sa personnalité profonde.
par Nathalie Hegron