Cette semaine, nous avons reçu beaucoup de réponses à la proposition d’écriture de Solange de Fréminville à partir du roman de Mathias Énard « Boussole » (Actes-Sud, 2015). Voici un des 8 textes sélectionnés: celui d’Olivier Martial.
Vacances
Pas un bruit rien j’ai beau tendre l’oreille pas même le son des voitures roulant sur l’autoroute il faut dire j’habite du bon côté de l’immeuble pilier sud ceux du pilier nord en plus de ne pas avoir de lumière sont aux premières loges c’est comme ça la banlieue moins cher mais on vit à côté de l’A86 enfin c’est pratique si on part en vacances partir partir où et puis je n’y pense jamais seulement au milieu de la nuit quand je ne dors pas c’est ça j’ai envie de partir en vacances à quatre heures du matin forcément je reste chez moi ça fait si longtemps je ne sais pas si je pourrais dormir dans un autre lit que le mien en même temps là je ne dors pas qu’est ce que ça changerait ne pas dormir dans un autre lit ou dans le mien ce n’est pas ma table de nuit qui me manquerait quand même non c’est vrai qu’elle m’accompagne depuis que j’ai cinq ans c’est fou je ne m’imagine pas la jeter elle est en bois foncé les poignées des deux tiroirs sont dorées dans celui du bas j’ai toujours entassé pêle-mêle des tas de trucs dont je ne me servais plus dans celui du haut j’ai entassé d’autres trucs et aussi des choses importantes mes papiers d’identité mes chéquiers j’entends une chasse d’eau c’est pénible ces immeubles construits dans les années 60 on connaît personne mais on est au courant de leur problème de prostate il doit être 4h30 et puis des photos aussi des photos dans des enveloppes en papier blanc sur les photos il y a des visages parfois même avec des sourires des photos de vacances elles datent pour une fois j’ai bien réussi la peinture c’est difficile un plafond la chambre est petite alors ça va vite mais à la lumière de ma lampe de chevet je ne vois pas ces marques qui peuvent tant m’énerver quand je ne dors pas j’allume la lumière maintenant un des côtés pratiques du célibat ça la réveillait avant j’allais dans le salon pour lire les oiseaux chantent je vais enfin pouvoir m’endormir.
O. Martial